Démarche traditionnelle ou crémeuse?

Lorsqu’on lit la définition générale du métier de relationniste sur Wikipédia, il y a peu de place pour la nuance de responsabilité sociale. « Les relations publiques sont l’ensemble des méthodes et des techniques utilisées par des groupements (entreprises, syndicats, partis politiques, États) et par des groupements d’intérêts, pour informer le public de leurs réalisations, promouvoir leur image de marque, susciter de la sympathie à leur égard à l’extérieur et favoriser les bonnes relations à l’intérieur. » Cette définition large est, de toute évidence, traditionnelle.

Heureusement, il y a les grandes tribunes d’échange à travers le monde qui orientent les tendances de fond en matière de responsabilité sociale. Pensons aux multiples conférences, écrits, recherches sociales, accords et mandats, dont celui de Melbourne.

La responsabilité sociale, un état d’esprit…

Dans un récent blogue, Patrice Leroux de l’Université de Montréal, affirme justement que « Le Mandat de Melbourne(1) vient en quelque sorte fixer, pour de bon, les Accords de Stockholm(2) qui portent sur les rôles des professionnels eu égard aux valeurs et à la personnalité d’une organisation pour laquelle ils œuvrent; à la culture d’écoute et au sens de l’engagement; aux comportements responsables des individus ainsi que ceux de l’organisation. »

Fixer pour de bon… sur papier. À quelques exceptions près, à mon avis, nous en sommes encore aux discussions de salon où il est bien vu de discourir sur le sujet. Suis-je trop sévère? Peut-être… On hâble, assurément. Et, c’est probablement la première enjambée de changements sociaux à venir. On ne change pas des comportements en criant « ciseaux », surtout pas des états d’esprit, car c’est bien ce dont il s’agit, soit d’une véritable culture sociale, d’un engagement tangible qui interpellent autant les secteurs privé que public. Comme le disent si bien Coombs et Holladay dans leur livre PR Strategy and Application, Managing Influence, (2010), la RSE varie selon la culture de l’entreprise et leur engagement « volontaire » prend différentes formes : défensive, opportuniste ou proactive. Sans vouloir faire preuve de pessimisme, les deux premières formes sont encore omniprésentes. Un suivi de l’actualité nous en fait la démonstration noir sur blanc, et ce, au quotidien. Dans un registre plus positif, force est de constater qu’un mouvement de fond semble timidement vouloir se pointer et que nous ne sommes peut-être pas si loin de passer de la parole aux gestes de façon plus manifeste.

L’engagement social, une responsabilité

Un coup de pouce, ou plutôt un coup de barre, doit être donné par le monde associatif de tout acabit tout autant que les institutions académiques. Ces organisations ont le devoir de sensibiliser les différents groupes professionnels de la société à l’importance de « l’adaptation » aux courants sociaux qui nous entourent. Un futur homme d’affaires doit être sensibilisé et formé à cette réalité très tôt et pourquoi pas sur les bancs d’école? Il en est de même pour un futur relationniste. En parallèle, les professionnels et les organisations, publiques ou privées, se doivent aussi et dès maintenant d’être sensibilisés et formés à cette réalité par la voie de leurs associations respectives. Il faut passer le mot… En faire un axe de pensée! Pourquoi les jeunes sont-ils si sensibles à la protection de l’environnement? C’est parce qu’on les sensibilise et qu’on les forme depuis leur tout jeune âge. Ils ont développé de nouveaux chromosomes. L’adéquation est simple.

Le haut de la pyramide et les relationnistes

De façon générale, en matière de responsabilité sociale d’entreprise (RSE), l’action passe par des décisions de haut niveau. Ce sont les têtes dirigeantes des organisations qui doivent dicter la voie de la gouvernance socialement responsable. Les praticiens en relations publiques ont aussi un rôle majeur à jouer auprès de la direction en inculquant les meilleures pratiques pour ce faire.

Pourquoi les spécialistes en relations publiques ont-ils un rôle si important? Parce que les approches sociales responsables sont basées sur tous les principes qui sous-tendent la bonne communication : l’écoute, le dialogue, l’information, la concertation, la consultation, la participation. Le relationniste est en mesure d’accoler des gestes concrets menant à une véritable démarche en RES.

La surinformation, les réseaux sociaux, l’affirmation citoyenne et j’en passe, prennent en souricière les organisations qui ne se sont pas encore adaptées, qui n’affirment leurs valeurs que sur leur site Internet, qui n’ont pas développé de culture d’écoute et d’engagement, qui ne comprennent pas le véritable sens de la responsabilité sociale. On s’étonne encore et souvent lorsque des collectivités posent des questions, et fréquemment de bonnes questions.

Les démarches dialogiques basées sur le précepte du « gagnant – gagnant » semblent un fardeau, pour plusieurs organisations. Elles sont vues comme exigeantes, lourdes et coûteuses. Pourtant, la démonstration du contraire a été faite. La création de liens étroits entre les entreprises, la société et ses parties prenantes amène des gains sociaux qui se reflètent de différentes façons : des parties prenantes en confiance, des compagnies intégrées harmonieusement à leur milieu ou des projets bonifiés, une gestion responsable partagée.

On parle déjà de « rendement social ». Mais, il faudrait extirper cette notion de son seul cadre lié aux placements financiers. Il serait intéressant d’aborder le « rendement social » dans un concept plus large qui affirmerait que les engagements sociaux des organisations et des parties prenantes, quels qu’ils soient, assurent un retour tangible sur l’investissement aux plans économique, environnemental et social, soit les bases mêmes du développement durable (DD) et de la responsabilité sociale d’entreprise (RSE).

À nous, praticiens des relations publiques, d’assumer le rôle qui nous revient pour contribuer à faire avancer les choses! Passer à côté est un manquement à notre profession.

1- Dans le cadre du Forum mondial des relations publiques 2012, à Melbourne, en Australie, 800 délégués de 29 pays ont adopté le Mandat de Melbourne. Ce Mandat fut adopté à la suite de plusieurs années de discussions entre des centaines de professionnels des relations publiques de partout dans le monde. Ce véritable réalignement des relations publiques fait ressortir leur caractère essentiel pour les organisations dans la réalité moderne.

2- En août dernier 2010, l’Alliance mondiale pour les relations publiques réunie en congrès en Suède adoptait les Accords de Stockholm, un effort sans précédent de codification du rôle des relations publiques à l’échelle planétaire. Cette initiative, qui a mobilisé des centaines de spécialistes des relations publiques de tous les continents, recèle un immense potentiel de renforcement de la crédibilité des relations publiques comme force centrale dans le développement des organisations de toutes natures. Les Accords de Stockholm ont été inspirés par divers travaux récents faisant autorité en matière de gouvernance des organisations. Il découle de ces travaux que les organisations sont plus que jamais imbriquées dans un réseau complexe d’interrelations avec leurs parties prenantes.

Laisser un commentaire